14 avril 2022, Bedford – L’Organisme de bassin versant baie Missisquoi (OBVBM) et l’Institut de recherche et développement en agroenvironnement (IRDA) ont développé, en collaboration, une méthode de production de bilan de masse du phosphore destinée à appuyer les actions concertées des communautés du Québec et du Vermont dans la réduction des apports de phosphore dans la Baie Missisquoi.
La gestion du phosphore (P) est ciblée par le projet, dans la mesure où cet élément nutritif est reconnu comme le principal facteur contribuant à l’eutrophisation et l’éclosion des algues bleu-vert dans la baie Missisquoi, qui reçoit en moyenne de 209 tonnes de P par an. Environ 72 T (35%) de cette charge annuelle de P provient des portions québécoises du bassin versant de la Baie, alors que 136 T proviennent du territoire Vermontois. Au Québec, une réduction des apports de P à la baie Missisquoi de 55% est ciblée de façon à rencontrer la concentration ciblée de 25 ug P/L pour les eaux de la Baie.
La réalisation de l’étude financée par le Ministère de l’environnement et de la lutte aux changements climatiques (MELCC) découle d’une recommandation de la Commission mixte internationale (CMI) dans son « Étude sur les apports en nutriments et leurs impacts sur baie Missisquoi du lac Champlain » publiée en avril 2020 (https://ijc.org/fr/lclm/etude-sur-les-apports-en-nutriments-et-leurs-impacts-sur-la-baie-missisquoi-du-lac-champlain ).
Un outil de planification régional
La réalisation d’un bilan de masse de phosphore vise à mieux comprendre la quantité de phosphore qui est exportée vers la baie Missisquoi provenant des activités humaines et du territoire dans l’ensemble du bassin versant, et soutenir à terme le développement d’une stratégie permettant d’équilibrer importations et exportations de phosphore. L’outil a été développé sur un des quatre principaux sous-bassins versants transfrontaliers qui alimentent la baie Missisquoi, soit le bassin versant de la rivière de la Roche localisé en majeure partie dans la municipalité de Saint-Armand pour sa portion québécoise.
Il s’agit en fait d’une première étape vers une étude de plus grande envergure couvrant l’ensemble des bassins versants affluents de la Baie Missisquoi. Financée par le fonds du Programme du bassin versant du Lac Champlain, cette initiative canado-américaine, regroupant les équipes du consultant Stone Environmental, l’Université du Vermont, l’OBVBM et l’IRDA vient d’ailleurs tout juste de prendre son envol.
Concrètement, l’étude réalisée à l’échelle du bassin versant transfrontalier de la rivière de la Roche a permis de dresser le portrait actuel des quantités de phosphore apportés sur le territoire du bassin versant, des stocks de P contenus dans les sols et des exportations de P à la rivière. L’outil développé permet par ailleurs de faire le lien et de projeter dans le temps l’évolution du stock de P contenu dans les sols et des émissions de P au cours d’eau qui en découlent, suivant différents scénarios de gestion des apports de P et de pratiques de culture.
La réalisation d’un bilan de masse de phosphore vise à mieux comprendre la quantité de phosphore qui est exportée vers la baie Missisquoi provenant des activités humaines et du territoire dans l’ensemble du bassin versant. À terme, cette modélisation permettra le développement d’une stratégie permettant d’équilibrer importations et exportations de phosphore.
Image : la baie Missisquoi est la portion transfrontalière du lac Champlain. Il y a principalement trois rivières qui s’y jettent : Missisquoi, aux Brochets et de La Roche.
Le phosphore, le principal ennemi des plans d’eau en santé
Les sols agissent comme une éponge avec le phosphore. Le phosphore s’y accumule graduellement sauf que parfois, les apports de phosphore excédent le prélèvement des cultures. Il faut donc éviter de trop enrichir les sols car lorsque « l’éponge » est pleine, les risques de pertes de phosphore vers la rivière s’accroissent grandement.
Selon l’étude, environ 17% des sols en culture du bassin versant ont atteint un taux de saturation en phosphore à risque. Considérant un statu quo dans les apports et les pratiques culturales actuelles, les résultats de l’étude indiquent que les stocks de P dans les sols et les charges de P à la rivière sont appelées à s’accroître dans le temps, aux horizons de 10 et 30 ans. La simulation de différents scénarios de gestion permet cependant de constater qu’il est possible de renverser la tendance et de réduire les charges de P à la rivière et plus en aval dans la Baie Missisquoi, notamment en adoptant des pratiques agroenvironnementales durables.
Le développement de l’outil de gestion du bilan du phosphore dans le bassin versant transfrontalier de la rivière de la Roche dont le mandat a été confié à l’IRDA a été rendu possible grâce au Programme de soutien régional aux enjeux de l’eau (PSREE) du Ministère de l’Environnement qui a octroyé un financement de 74 763 $ sur un budget de 101 413 $. Cette initiative est prévue dans le Plan d’action 2018-2023 de la Stratégie québécoise de l’eau, qui déploie des mesures concrètes pour protéger, utiliser et gérer l’eau et les milieux aquatiques de façon responsable, intégrée et durable.
Source : Aubert Michaud, PhD, Chercheur associé, Organisme de bassin versant de la baie Missisquoi, aubert.michaud@obvbm.org
Et
Anthoni Barbe, Chargé de communication OBVBM, communications@obvbm.org 514 404-5033